Revenir au site

Une proposition simple pour transformer les organisations : si je dois planter un clou, je tiens le marteau...

Manifeste pour l’application du principe de subsidiarité en entreprise.

4 janvier 2018

Je suis troublé, des pointillés rouges apparaissent sous le mot « subsidiarité », Apple (l’application Notes) ne connait pas ce mot. Mais peu importe, voici une tentative de définition, pour Apple, et pour les besoins de cet article. Par chance, Wikipedia, lui, connait : « Le principe de subsidiarité est une maxime politique et sociale selon laquelle la responsabilité d'une action publique, lorsqu'elle est nécessaire, revient à l'entité compétente la plus proche de ceux qui sont directement concernés par cette action ».

La subsidiarité est donc un principe que l’on décide d’appliquer à un champ d’activité, politique, social, ou organisationnel si l’on considère l’entreprise. Ce principe a été popularisé dans le champ politique par la construction européenne et les réformes de décentralisation en France.

Il existe deux applications du principe de subsidiarité :

  • Descendante, qui consiste à déléguer la prise de décision à un échelon inférieur de l’organisation. Dans ce cas, l’échelon supérieur s’interdit de réaliser et de décider ce qui peut l’être par un échelon inférieur.
  • Ascendante, qui consiste à laisser un échelon supérieur décider car l’échelon inférieur n’a pas la capacité de décider seul ou sa décision implique fortement l’échelon supérieur.

Autrement dit, et de façon plus simple, le principe de subsidiarité consiste à allier pouvoir et responsabilité. La personne ou l’équipe qui a un pouvoir, possède la responsabilité de ce qui est produit et est en mesure de décider seule pour produire ce qui est demandé ou attendu. Ici, pouvoir veut dire capacité à accomplir la tache qui a été confié, capacité en terme de compétences et de moyens. Ce pouvoir est donc octroyé à une personne ou à une équipe parce qu’elle est capable ou se sent capable d’accomplir la mission qui lui a été confiée. Elle en porte la responsabilité. Il lui incombe ensuite de décider comment l’accomplir. Pour accomplir cette mission, elle admet pouvoir prendre une décision seule. Ce pouvoir de décision est à la fois un droit et un devoir. En effet, le principe de subsidiarité amène des droits : celui de décider et des devoirs : celui de respecter le fonctionnement et de ne pas demander aux autres de décider à notre place (subsidiarité ascendante) et de ne pas décider pour d’autres que l’on a nommé responsables (subsidiarité descendante).

Ne pas respecter ce principe est injuste en soi et encore plus s’il est censé être en place dans une organisation.

Trois situations sont les symptômes du non respect du principe de subsidiarité en entreprises. Ces situations ne sont pas graves, ce sont les conséquences qui peuvent l’être :

  • Nommer quelqu’un responsable de planter un clou (responsabilité) sans lui donner le marteau (pouvoir). La conséquence est simple : on se fait taper sur les doigts et on a de moins en moins envie de planter des clous…
  • Dire comment il faut manier le marteau et comment il faut planter les clous. C’est à dire édicter des règles, toujours plus nombreuses qui amènent de la démotivation et de la perte d’autonomie et de sens au travail. Cette situation tue toutes possibilités d’informations remontantes et d’innovations. Elle est pourtant monnaie courante dans les entreprises qui fonctionnent souvent en mode « command & control » ou « battons et carottes », je vous laisse le choix de la formule.
  • Ne pas accepter de tenir le marteau alors que notre mission est de planter des clous. Si un collaborateur (ou une équipe), ne veut pas décider, il ne pourra pas gagner en responsabilité et faire progresser l’entreprise. Il fera assumer à d’autres ses responsabilités et ne pourra pas développer ses compétences. On apprend à planter des clous parce que l’on se tape sur les doigts. Il faut donc avoir un droit à l’erreur en entreprise et un devoir d’entreprendre de la part de chacun des collaborateurs. Évidemment adaptés aux compétences, à l’expérience et à l’ambition de chacun.

Ces trois situations sont la gangrène qui ronge peu à peu les entreprises et qui se propage par des fonctionnements, des règles et des comportements qui ne permettent pas de respecter ce principe de subsidiarité. De façon volontairement entretenue ou par la force des choses et de l’histoire. Cette perte de sens est de responsabilités peut en partie expliquer la difficulté de certaines entreprises à attirer, recruter et motiver les personnes, notamment les jeunes diplômés.

Pour y remédier, il faut donc allier pouvoir et responsabilité dans les organisations. Celui qui est responsable de planter le clou tient le marteau. Et encore mieux : il sait pour qui et dans quel contexte il doit planter un clou.

Une question d’organisation et de perception du travail

La question de la subsidiarité est une question d’organisation, c’est aussi une question de perception du travail. Allier pouvoir et responsabilité, c’est permettre à chacun de développer sa liberté et son autonomie dans le temps. J’aime cet exemple du tailleur de pierres qui peut se dire, en fonction de la perception de son travail :

  • « Je suis tailleur de pierres »
  • « Je construis une voute »
  • « Je suis bâtisseur de cathédrale »

Il est bien ici question de perception du travail et de l’environnement de travail.

Susciter et créer cette perception est le rôle des organisations.

Pour y arriver, elle doivent permettre à chacun de s’engager sur la base :

  • D’une culture d’entreprise, c’est à dire de principes d’action clairs et partagés. Comment nous faisons les choses au sein de notre organisation ? En y incluant ce principe de subsidiarité.
  • D’une mission d’entreprise claire et partagée : Que faisons-nous ou voulons-nous faire ensemble ?
  • D’une vision claire et partagée dans le temps et dans l’espace pour que chacun puisse s’approprier les objectifs de l’entreprise à court / moyen terme, et y contribuer.

Si je comprends dans quel contexte, pourquoi et pour qui je dois planter des clous, je serais plus à même de décider de les planter, motiver pour le faire, et créatif pour proposer de nouvelles façons de planter des clous. Je pourrais même proposer des endroits différents où les planter où encore inventer de meilleurs clous, ... bref entreprendre et innover.

Ce sont ces éléments qui sont la base du projet de l'entreprise et qui sont pourvoyeurs de sens pour les collaborateurs. On notera d'ailleurs la polysémie du mot sens qui peut vouloir dire signification (mission de l'entreprise), direction (vision et stratégie) et sensibilité (culture et environnement de travail).

Avantages et mise en application

Les avantages de l’application du principe de subsidiarité sont nombreux :

  • Plus grande liberté, motivation, responsabilité et autonomie pour chacun,
  • Meilleures compréhension et contribution au développement de l’activité de l’entreprise,
  • Gain de temps pour le collaborateur (process de décision facilité) et pour les managers,
  • Plus grande capacité à innover et à être créatif car chacun à les moyens de répondre aux besoins qui le concernent, et de décider comment il entend y répondre.
  • Et donc gain d’efficacité opérationnelle et organisationnelle (et donc gains financiers).

Alors pourquoi ce principe est-il si peu appliqué ?

Parce qu’il nécessite une prise de risque : faire confiance aux hommes et aux femmes.

Il est en effet toujours plus facile de :

  • Décider pour autrui car « il n’en est pas capable »,
  • Édicter des règles et contrôler qu’elles sont bien appliquées,
  • Faire plutôt que faire faire, laisser faire ou même laisser advenir.

Le socle de cette délégation sont donc les éléments cités ci-dessus : culture / cadre d’entreprise, mission et vision. Ensuite chacun est à même de s’engager, il le fera s’il est accompagné et si ceux qui l’accompagnent sont exemplaires. Décider et être responsable n’empêche pas d’être aider, de se faire guider par l’organisation et le management.

Cette accompagnement se fait en fonction de la volonté et des compétences de chacun et est intrinsèquement risqué. Ce risque est lié à l’exercice de la liberté, de la créativité de chacun, que nous ne maîtrisons pas, par définition.

Voici quatre postures ou attitudes d’accompagnements à développer afin d’arriver à la mise en place du principe de subsidiarité :

Appliquer ce principe de subsidiarité, c’est reconnaître la primauté de la personne au sein des organisations. Cela revient à promouvoir une certaine conception de la vocation des entreprises qui serait de faire grandir les personnes et les communautés de personnes, au service d’un certain vivre ensemble, incarné par les collaborateurs et plébiscité par les clients. Les profits suivront.

Le projet ARMEN est un club qui propose à ses clients des ateliers d'intelligence collective pour répondre aux enjeux de votre organisation. Les membres du club vous aident à discerner et proposent des pistes d'actions concrètes en fonction de leur expériences. Les thèmes des ateliers et les membres qui y participent sont choisis en fonction de vos problématiques, par exemple : comment définir la vision de mon entreprise ? Comment formaliser la culture de mon entreprise ? Comment mettre en place le principe de subsidiarité...

N’hésitez pas à partager vos questions, remarques et expériences par mail ou dans les commentaires ci-dessous. Et à partager cet article pour qu'il inspire vos proches !